Une bonne balade de trois semaines autour du Québec en stop, voir sur le pouce comme diraient nos cousins.
Récit de mémoire douze ans après en utilisant les diapositives pour essayer de reconstituer le fil du voyage.
Vol de Paris à Montréal avec la compagnie Canada 3000. S’ils avaient pu mettre des passagers dans le poste de pilotage, ils l’auraient fait. Du bon charter quoi. Nuit à Montréal.
Objectif Québec. Nous commençons par prendre le bus pour aller au fin fond de la banlieue de Montréal et se mettre au départ de la route de Québec, celle qui longe le Saint-Laurent rive nord. Sauf que ça ne prend pas. Normal, les personnes qui vont à Québec empruntent l’autoroute gratuite. Sur la petite route, il n’y a que de la desserte locale. Nous finissons par nous diriger vers l’autoroute. Et effectivement, en arrivant vers l’échangeur, deux filles nous prennent. Et en plus, elles quittent même l’autoroute pendant un moment pour nous montrer la route que nous voulions voir. Nous arrivons enfin à Québec. C’est la pleine saison touristique. Nous assistons à des spectacles de rue le soir. Le lendemain, visite de la ville, surtout la partie ancienne. Ça doit pratiquement être la seule ville d’Amérique du Nord à avoir un aspect médiéval, les règlementations anti-incendies ayant imposé de séparer les maisons mitoyennes par des murs en pierre à l’époque où tout était en bois. Seconde nuit sur place.
Nous partons d’abord en bus jusqu’à la chute Montmorency, à quelques encablures de la ville. Visite des chutes sous un ciel bouché. Puis nous rejoignons l’autoroute en contrebas pour repartir en stop vers le bas Saint-Laurent.
De nouveau, ça ne prend pas très bien... avant qu’une voiture ne s’arrête avec au volant, une des deux filles du parcours Montréal-Québec. Après quelques relais, nous parvenons à l’Île aux Coudres. Nous prenons le traversier pour nous rendre sur l’île elle-même. Nous nous installons au camping. Les maringouins sont nombreux et vigoureux. Nous nous enduisons de Muscol, la marque locale de répulsif à moustique. Quand nous faisons du stop pour aller au restaurant le soir, le couple qui nous prend remarque tout de suite l’odeur caractéristique. Au retour, c’est le cuistot du restaurant qui nous prend en stop en sortant du boulot. Le lendemain, nous louons des vélos pour faire le tour de l’île. Ça ne nous occupe qu’une partie de la journée. Alors, nous prenons le traversier avec nos vélos pour aller tester la côte des Éboulements. Mais elle est pentue de chez pentu. Nous renonçons assez vite. Retour sur l’Île aux Coudres qui présente aussi une belle côte à la sortie du traversier. Nuit sur place.
C’est reparti. Traversier. Tentative de stop. En attendant que ça morde, nous commençons à partir à pied pour rejoindre la route principale. Au début, c’est horizontale mais ensuite, ça monte. C’est la même côte que la veille. Après un moment d’hésitation, nous attaquons la montée. En cours d’ascension, une riveraine prend pitié de nous et sort sa voiture pour nous amener au sommet. Ensuite, sur la route principale, ça va mieux. Nous rejoignons Saint-Siméon où nous prenons le traversier pour Rivière-du-Loup. Débarquement à la nuit tombante. Un petit coup de stop avec le docker ayant amarré le traversier et nous allons dormir dans la ville. Retour sur la route lendemain matin. Bruno de la Radio, qui bosse dans une radio sur les Îles de la Madeleine mais n’est pas un vrai madelinot, nous avance un bon coup. Nous arrivons à Sainte-Anne-des-Monts. Ça commence à bien flairer la Gaspésie. Nous avons dû passer la nuit dans le coin.
Courses le matin puis prise en stop instantanée pour aller au cœur de la Gaspésie. 40 km plus loin, nous sommes au cœur du Parc National de la Gaspésie. Balade pédestre dans le coin le long de la rivière Sainte-Anne et sa chute d’eau arrêtant la remontée des saumons. Camping. Le lendemain, nous prenons l’excursion pour le mont Jacques-Cartier. Malheureusement, le brouillard est au rendez-vous, ce qui constitue plus la norme que l’exception pour ce sommet là. C’est le plus haut sommet du Québec habité (il y en a un autre plus haut dans le Grand Nord). C’est aussi la seule colonie de caribous au sud du Saint-Laurent. Mais nous n’en verrons que deux s’éclipsant dans la brume. Nouvelle nuit sous tente.
Nous ressortons du parc par le même chemin qu’à l’aller mais en se faisant prendre en stop par une blonde sportive bronzée en Audi, la maître-nageuse de l’hôtel du coin. Sa conduite aussi, est assez sportive sur la route de montagne. De Sainte-Anne-du-Mont, nous avons repris la route longeant la côte de la Gaspésie. Ça n’a pas dû aller très loin le premier jour. Après une nuit dans un bled oublié, nous sommes de nouveau sur la route. Après une dame pas bavarde mais qui était très contente de nous rendre service, nous tombons sur un gars qui passe par-là pour le boulot. Il doit faire un crochet par Murdochville qui hélas n’est pas sur la côte mais à l’intérieur des terres. Il doit livrer deux CD de Windows 95. Néanmoins, las d’attendre, nous prenons cette option. 40 km dans les forêts. Nous arrivons à Murdochville. C’est une ville minière qui exploite le cuivre. Deux rues goudronnées avec des baraques en bois entre les terrils, il ne manque que les chevaux. Après la livraison, nous reprenons la route pour 80 km de zones inhabitées jusqu’à Gaspé. Nos chemins divergent alors. Une petite averse s’abat pendant que nous cherchons un nouveau véhicule. Ça inspire de la pitié au premier venu, qui nous emmène rapidement au Parc National du Forillon.
Installation au camping vers le bout du Parc. Attention aux ours. Le lendemain visites. Nous commençons par le magasin Hyman, un système monopolistique qui exploitait les pêcheurs locaux en leur vendant du matériel et en achetant leur production. Nous continuons en vélo jusqu’à la pointe du Parc puis terminons à pied la montée au point de vue depuis le sommet du Parc. Nouvelle nuit au camping. De bon matin, nous assistons à l’activité d’interprétation de la vie marine de la Baie des Chaleurs. Des charmantes hôtesses, aidées de plongeurs, nous montrent les diverses formes de vie des profondeurs marines en nous en expliquant les tenants et aboutissants. Par exemple, l’eau rentre d’un côté du concombre de mer pour ressortir de l’autre...
Direction Percé... et son rocher percé. Nous arrivons à temps pour profiter de la marée basse qui doit nous permettre de rejoindre à pied sec l’arche formée par le dit rocher. Malheureusement, il y a un fort vent qui ramène les vagues contre le rocher et qui empêche le passage du côté prévu. Nous tentons l’autre côté du rocher qui à l’avantage d’être à l’abris du vent. C’est moins à pied sec mais nous parvenons à l’arche. Au retour, nous manquons de nous faire surprendre par la marée. Nuit dans le coin puis excursion en bateau à l’île Bonaventure. Balade à pied sur l’île dont la forêt rappelle fortement celle de la lune forestière, dans le retour du Jedi, à un facteur d’échelle près. Photographie des colonies de fous de Bassan au sommet. Retour sur la terre ferme pour la nuit.
De bon matin, nous attaquons la Baie des Chaleurs en stop. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que ça ne marche pas bien. Nous commençons par rester un bon moment scotché à la sortie de Percé. Ça nous permet de voir à quel point les canadiens sont accros à l’automobile. Nous voyons une personne prendre sa voiture pour traverser la route... puis la reprendre pour rentrer chez elle.
Certes, les maisons sont un peu en retrait mais ça ne doit pas dépasser les 50 mètres de distance. Faute de voiture, nous commençons un peu à marcher le long de la route. Finalement, une dame nous prend bien qu’elle semble hésitante. Et fait, elle pensait avoir à faire à un couple. On ne sait toujours pas qui était censé faire la fille. En alternant sauts de puce et marche, nous avançons petit à petit. En tout, six automobilistes différents se relayeront, certains pour 3 km, d’autres sur plus de distance. Le curée du coin nous embarquera deux fois de suite. Il est originaire des Îles de la Madeleine. Quand nous lui parlons de Bruno, sa première réaction est : « C’est pas un madelinot... ». Nous finissons la journée à Carleton. Le lendemain, rebelotte. Ça va un petit peu mieux. Quelques années avant nous, des auto-stoppeurs ont assassiné le conducteur qui les avait pris. Ça n’aide pas. Nous avons le droit au bidasse avec les grenades qui traînent sur le plancher. La remontée de la Matapédia s’est faite d’un seul coup.
De retour au bord du Saint-Laurent, nous terminons jusqu’à Rimouski avec un plongeur professionnel, ancien membre de l’équipe canadienne de natation qui est venu s’entraîner à Font-Romeu. Nuit à Rimouski. Toujours sur la route, nous allons jusqu’à Trois-Pistoles pour prendre le traversier. Nous arrivons en avance. En attendant le bateau, nous nous renseignons pour nous balader dans le coin. Pas de problème : « Vous pouvez aller là-bas, c’est à cinq minutes. ». Nous commençons à y aller à pied mais les cinq minutes, c’est en voiture... Visiblement, les québécois ne savent plus ce que c’est la marche à pied. Finalement, nous allons directement à l’embarcadère. Débarquement à Les-Escoumins. Un dernier morceau de stop nous amène à Grandes-Bergeronnes.
Camping à Grandes-Bergeronnes et excursions aux baleines. On est juste à côté de Tadoussac, le spot mondiale de la baleine. Au fond du Saint-Laurent, il y a une arrivée d’eau froide du Labrador qui rencontre un obstacle à cet endroit et remonte à la surface en se mélangeant aux eaux plus chaudes. Ça favorise la production de plancton dont raffolent les baleines. Si on rajoute à ça l’arrivée d’eau douce du Saguenay, c’est le panard et les baleines viennent prendre ici leur quartier d’été. C’est aussi ce qui fait la différence avec pas mal d’autres coins de la planète où on se contente d’observer les baleines de passage. En pratique, nous prenons une excursion organisée en zodiac. Il y a même une naturalise sauf qu’il y a deux bateaux et qu’elle nous annonce qu’elle va sur l’autre au moment du départ. Pour les baleines, ça va pas mal. Nous avons observé pas mal de petit rorqual (?) et de béluga. En plus, comme c’était la fin de la saison touristique, il n’y avait pas trop de bateaux d’observation. Par contre, la remontée d’eau froide, nous l’avons bien sentie. 3-4° au raz de l’eau fin août, ça calme.
Après l’excursion, nous migrons à Tadoussac. Nous nous installons dans le pseudo-camping organisé derrière l’auberge de jeunesse. En fin d’après-midi, nous participons à une balade avec Kiwi, un énorme photographe néo-zélandais qui attend l’hiver pour aller photographier les caribous dans le Grand Nord. Au bord d’un plan d’eau non loin du village, il nous fait découvrir des castors. Le soir, nous allons nous coucher, comme d’habitude. Sauf qu’un peu plus tard, un couple constitué d’un touriste et d’une employée de l’auberge de jeunesse viennent planter leur tente à environ à un mètre de la notre. Et ils discutent copieusement une bonne partie de la nuit. Ils finissent par se taire sans passer à l’acte. Manque de chance, ce sont les camions qui prennent le relais. Ils se font au frein moteur la descente à 10% qui va de Tadoussac village au traversier sur le Saguenay. Après cette nuit moyennement reposante, nous partons pour une croisière dans le Fjord du Saguenay. Nouveau plan foireux. Il n’y a pas grand chose à voir, style la source de la pisse du cerf, qui coule sur deux mètres avant d’arriver dans le fleuve. En plus, il y a du brouillard avec limite la pluie. La totale. De retour à Tadoussac, nous plions notre tente quand nous entendons qu’il reste le gars dans la tente voisine qui essaie de dormir. Nous nous montrons assez bruyants, limite vulgaire, en rangeant notre matériel.
Objectif suivant, Chicoutimi et le Lac Saint-Jean. Nous nous faisons prendre en stop par le capitaine du bateau nous ayant proposé la superbe excursion du matin. Il nous amène jusqu’à Sacré-Cœur. Et là, nous restons planté. Ça ne prend pas. De rares voitures souvent pleines. La nuit tombant, nous consultons le Guide du Routard pour trouver un point de chute. Ce sera la Ferme 5 étoiles, quelques kilomètres plus loin, que nous rejoignons à pied. Nous prenons une chambre en dur. Petit déjeuner à volonté. Nous nous goinfrons de crêpes au sirop d’érable. Comme c’est pas mal, nous en profitons aussi pour faire la lessive et dire bonjour au loup et autres animaux en captivité. Il est midi quand nous nous remettons sur la route. Le beau temps est de retour mais ça ne mord pas plus. Assez rapidement, nous nous mettons à faire du stop dans les deux sens. Rien. Nous décidons d’abandonner l’objectif de Chicoutimi et d’aller directement sur Québec en faisant demi-tour. En fin d’après-midi, nous partons à pied en direction de Sacré-Cœur pour augmenter nos chances de retourner sur la route principale qui passe à Tadoussac. Nous campons au bord de la route, sur une aire de repos, à proximité de Sacré-Cœur. Aux aurores, nous partons à pied pour Tadoussac. Douze kilomètres à pied, ça maintient en forme. Mais nous n’avons pas quitté Sacré-Cœur qu’un habitant du cru nous prend et nous amène à destination. Là, nous enchaînons avec la traversée du Traversier à pied. Nous commençons à marcher en faisant du stop. Il y a beaucoup de voitures rentrant sur Québec et Montréal car c’est le dernier dimanche des vacances. Une d’elle s’arrête avec un jeune : « Vous n’étiez pas à l’auberge de jeunesse ? ». « Si ». C’était juste le pensionnaire de la tente d’à côté mais qui ne savait pas que nous étions voisins. Nous faisons un bout de route avec lui. Prise de relais par un couple de jeune qui a déjà pris un autre auto-stoppeur. Nous nous retrouvons à cinq dans la voiture. Ça bouchonne et comme la côte de Charlevoix est vallonnée, ça oblige à beaucoup freiner, surtout que la voiture a une boîte automatique sans frein moteur. Dans la dernière descente sur Beaupré, une fumée blanche s’élève des ailes et ça freine beaucoup moins. Arrêt d’urgence sur le bord. Pour alléger le véhicule, nous repartons à pied, les abandonnant à leur triste sort. Un routier homosexuel, mais qui n’est pas en service, donc en voiture en non en camion, nous amène jusqu’à Montréal. Ça s’est bien rafraîchit à Montréal et les touristes ne sont plus là. Nuit à l’auberge de jeunesse.
Le lendemain matin, nous partons en bus pour le Parc National de la Jacques-Cartier, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Québec. Il nous pose à l’entrée. Un petit coup de stop nous amène au centre d’accueil à l’intérieur du parc. Installation de la tente. La Rivière Jacques-Cartier traverse le parc au fond d’une vallée glacière très caractéristique. Et à part suivre la rivière dans un sens ou dans l’autre, il n’y a pas grand chose à faire mais c’est déjà pas mal. Le premier soir, c’est ce que nous faisons à pied. Tient, on dirait un barrage de castor. Puis cette grande zone d’eau calme, ça doit leur plaire aussi. D’ailleurs, il y en a un qui est en train de traverser la rivière. Nuit un peu dérangée par des animaux rôdeurs. Le lendemain, nous louons des VTTs. Nous remontons la vallée par la route quand nous tombons sur un groupe d’orignaux, la maman avec ses deux petits. Ils sont moyennement sauvages et nous les avons approchés à quelques mètres. Une voiture les fait fuir mais pas très loin. Nous continuons notre balade jusqu’au bout de la vallée avant de faire demi-tour. Nous retombons sur le même groupe que nous photographions de nouveau. La nuit se rapprochant à grands pas, nous décidons de rentrer au campement. Sur la fin du parcours, la nuit commence même à être bien profonde. Il y aurait eu un ours sur la route, que nous ne l’aurions point vu. Un bon feu de bois le soir. Le surlendemain, nous avons quelques mots avec la location de VTT car suite à une inspection minutieuse, elle détecte qu’un rayon est cassé et veut nous le facturer au prix fort.
Nous ressortons du parc en stop. Sur la route principale, ça se passe bien aussi. Nous voulons aller à Montréal ce qui à priori, nous impose un changement à Québec sauf que nous tombons sur quelqu’un qui vient de Chicoutimi et qui doit passer faire une course à Québec avant d’aller à Montréal d’où son détour par là où nous sommes. Affaire rondement menée, nous voilà à Montréal.
Il fait bien chaud, limite moite à Montréal. Nous nous installons dans une chambre chez l’habitant, des petits vieux pas mal situés, très proche du centre-ville.
Montréal est une ville très américaine par sa structure. Il y a un centre avec des gratte-ciel. Ensuite, on trouve autour une zone de petits immeubles anciens plutôt dégradés. Et enfin, la banlieue pavillonnaire s’étend à perte de vue. À Montréal, il faut quand même mentionner qu’il y a un quartier entre le centre-ville et le bord du Saint-Laurent, qui est ancien sans avoir mal tourné. Donc, le premier jour, nous avons principalement visité le centre-ville et ce quartier avec son hôtel de ville de style Napoléon III. Le soir, nous sommes montés au sommet du Mont-Royal pour voir la tombée de la nuit sur la ville. Le lendemain, visite du secteur olympique avec la tour penchée censée tenir le toit du stade, le jardin japonais et le biodôme. Ils sont marrants, les manchots. Dernière nuit au Québec.
Au réveil, on a perdu une dizaine de degrés par rapport à la veille, avec 13°C. En plus, il pleut comme pas possible. Direction l’aéroport... en bus, pas en stop. Vol de nuit pour la France. À l’atterrissage, grand beau mais beaucoup plus froid : 3°C au sol. Frais le début du mois de septembre.
Fin de l’aventure. Nous avons parcouru environ 2500 km en stop. Même s’il y a eu quelques passages galère, ça a été très sympa, en particulier pour les contacts avec les gens.